Voilà, c’est dit : Bruxelles passe en « ville 30 » le 1er janvier, c’est-à-dire que la vitesse y est limitée à 30 km/h sauf sur les grands axes.
Ce qui, on s’y attendait un peu, déclenche un débat passionnel, motivé surtout par la panique de ne plus pouvoir appuyer sur le champignon (« ma liberté »), et justifié – c’est nécessaire parce que le premier argument est peu défendable – par la perte de temps qui en résulterait pour les automobilistes.
Il est temps d’ajouter un peu de rationnel au débat.
Cette mesure n’est pas tombée du ciel : elle a été prise sur base d’arguments sérieux.
Relatifs à la sécurité d’abord : en roulant à 30 km/h (8 mètres par seconde quand même !) le risque d’accident est estimé trois fois moindre et les risques de blessures ou décès encore moins élevés. Ceci déjà dev(r)ait suffire à faire réfléchir.
Ensuite, la convivialité et l’attractivité de la ville, incitant notamment à moins recourir à la voiture, au bénéfice de l’environnement comme de la santé. Et, pour l’anecdote (quoique), il est démontré aussi que les gens qui se déplacent à pied et à vélo sont de meilleurs clients pour les commerçants…
Enfin, pour la crédibilité, et par là le respect des vitesses autorisées, le concept de ville 30 avec exception à 50 est beaucoup plus clair et lisible que les limitations tronçon de rue par tronçon de rue, au moyen de panneaux de petit format cachés parmi les autres, qui sont la règle jusqu’à présent. Une fois les habitudes acquises Il en résultera un plus grand respect.
En regard de ce qui précède, quels sont les effets négatifs ?
Le principal avancé a trait donc à la perte de temps. Pourtant :
- d’une part de plus en plus de rues bruxelloises étaient déjà en zone 30, et pour la plupart des autres on ne peut se « lancer » à 50 que jusqu’au carrefour suivant, souvent proche
- d’autre part beaucoup des grands axes aménagés en ce sens, qui sont ceux sur lesquelles se parcourent les plus grandes distances et donc où la vitesse est intéressante, restent autorisés à 50.
En imaginant rouler sans obstacles à cette vitesse on joint le centre depuis la périphérie (8 kilomètres) en dix minutes (qui dit mieux ?). Quoique, en réalité, avec les feux et souvent les files, le temps de parcours est nettement supérieur, nonobstant la limite de vitesse, qui n’a en définitive que peu d’incidence.
Dans les autres rues, où on ne parcourt généralement qu’un ou deux kilomètres, voire moins, et où le trafic est heurté du fait des intersections (priorités de droite, ronds-points, …), l’effet du 30 sur la durée du trajet est de l’ordre de la minute : insignifiant.
La vitesse moyenne d’un trajet en voiture à Bruxelles est de l’ordre de 20 km/h. L’argument temps de parcours opposé au concept de ville 30 ne tient pas la route.
Certains avancent que la pollution est supérieure à 30 km/h. C’est vrai pour un véhicule roulant à vitesse constante, mais ce cas de figure n’est pas pertinent dans les rues urbaines, où la vitesse est hachée et, au contraire, où une conduite souple évitant les fortes accélérations entre deux freinages limite la pollution atmosphérique comme les nuisances sonores.
Bruxelles Ville 30 est un aboutissement : la capitale de l’Europe rejoint ainsi les villes de plus en plus nombreuses qui ont compris les problèmes de mobilité, de sécurité et d’environnement. Pour la petite histoire : Bruxelles Ville 30 (avec des dérogations, comme la mesure actuelle) avait été préconisé à la fin du XXème siècle par l’association de personnes non motorisées NoMo. Le Bureau suisse de Prévention des Accidents, lui, a introduit le modèle 30/50 vers 2002.
Et nous, automobilistes et citoyens bruxellois, nous comprendrons comme les autres (après les autres 😉) où se trouve notre intérêt.