Cette années, 2023, le jour du dépassement a été le 2 août ; on consomme 1.7 planète(s) par an. Le bonheur de l’humanité est-il à ce prix ? Petit aperçu pour le domaine des transports.
Depuis soixante ans – le début des « golden sixties » – le nombre de voitures dans notre pays a été multiplié par cinq. Et comme les voitures – chaque voiture – ne roulent pas moins, le trafic a lui aussi été multiplié d’autant.
Sommes-nous pour autant cinq fois plus heureux ? Au vu de ce qui suit, la question mérite certainement d’être posée.
En effet, on a maintenant pris conscience d’un enjeu planétaire majeur : le réchauffement climatique, et d’une de ses causes : les émissions de gaz à effet de serre. Et il se fait que, alors que la situation est plus ou moins sous contrôle pour les autres grands secteurs consommateurs (l’industrie et le secteur domestique, résidentiel), les émissions des transports n’arrêtent pas d’augmenter.
Aussi l’Union européenne a-t-elle décidé d’électrifier le parc automobile : d’ici 2035 les voitures seront électriques ou ne seront plus.
La décision européenne part du principe que l’impact environnemental global d’une voiture électrique est, toutes choses égales par ailleurs, moindre que celui d’une voiture à combustion de carburant fossile. Le fait est indéniable, on ne le contestera pas : une Fiat 500 électrique par exemple score mieux qu’une Fiat 500 essence. La précision « toutes choses égales par ailleurs » a toute son importance, parce que c’est là que le bât blesse.
L’évolution a commencé : il y a de plus en plus de voitures électriques.
Mais des voitures de plus en plus lourdes : le bestseller actuel est un SUV qui atteint souvent deux tonnes, alors qu’en 1960 la voiture moyenne en Europe pesait moins d’une tonne. Et des voitures de plus en plus puissantes : pratiquement aucune qui ne roule à moins de 160 km/h, et la norme est plutôt 200. Avec la consommation qui en découle.
Ces deux facteurs ont un impact non négligeable : globalement, un SUV électrique a une incidence environnementale supérieure à une Fiat 500 à essence… Et qu’il continue à y en avoir de plus en plus ne fait évidemment que multiplier d’autant le problème.
Non, l’Europe n’aura pas résolu le problème de l’incidence environnementale des transports par l’électrification du parc automobile.
Celle-ci ne passera que par une rationalisation des déplacements, couplée à l’utilisation de modes moins énergivores : transports en commun et modes doux (un vélo, même électrique, consomme vingt fois moins qu’une voiture). Et là pas grand-chose d’efficace ne se fait… Il y a bien quantité de mesures ici et là, européennes, nationales ou locales, mais – c’est ce qui est important – l’économie globale de l’évolution va dans le sens d’une perte de performances environnementales du système de transport.
Et, à un autre niveau, l’État belge, avec ses larges subventions aux SUV « de société », même électriques, est complice. D’autant que, au niveau des alternatives, la gabegie au niveau ferroviaire, compétence fédérale également, n’arrange rien.
Bien sûr on vous dira qu’il faut continuer à pouvoir se déplacer. Incontestablement ; mais est-il indiqué qu’on doive de plus en plus se déplacer ? Qu’on y soit obligés ? En étalant sans cesse les activités humaines, avec les lotissements éparpillés et la multiplication incessante des zonings d’activité implantés en pleine campagne – la grande mode en Belgique, dont les édiles se félicitent au nom de l’emploi créé (en fait délocalisé -), les autorités se font complices du problème. L’industrie de la construction se porte bien, merci. On entend bien dire parfois qu’on arrêtera de bétonner en 2050 : ça laisse 27 ans de beaux jours, et, surtout, la vraie décision aux autres.
Non, les régions, compétentes en Belgique pour l’aménagement du territoire, ne contribuent pas non plus à résoudre le problème de l’incidence environnementale des transports.
Et quand celle-ci aura encore une fois doublé, seront nous deux fois plus heureux ?