Une ville pour ses usagers

Une ville pour ses usagers

Il fut un temps où, poussé par une logique venant des Etats unis, on avait décidé que la ville était au service de ses automobilistes (et de ceux de la banlieue environnante).  Depuis lors, fort heureusement, sous la pression de ses habitants, les aménageurs sont quelque peu revenus sur cette idée pour le moins suicidaire.  S’en sont suivis des aménagements plus orientés vers les êtres humains qui peuplent et qui fréquentent la ville.  À Bruxelles, une des dernières manifestations de ce revirement est la piétonisation d’une petite partie des boulevards centraux.  Ouf, enfin, serait-on tentés de dire : le cœur de la capitale de l’Europe pouvait difficilement rester éternellement coupé en deux par une saignée routière – jusqu’il y a peu à quatre bandes de circulation : il fallait donc faire quelque chose.

Pourtant, ce nouveau piétonnier est autant décrié qu’encensé.  Passons sur les aménagements de voirie, lamentables : on nous assure que ce n’est que du provisoire, et on veut y croire.

Arrêtons-nous sur les récriminations des commerçants : leur réaction est archiclassique, ils ont vu disparaitre quelques places de parking et quelques voitures, on ne leur retire pas de l’idée qu’une voiture en moins signifie pour eux la faillite inéluctable.  Lorsqu’on voit le succès commercial des nombreuses initiatives de piétonisation avec tram menées ces dernières décennies en France, on se permet d’en douter, mais encore faut-il les convaincre, ce qui typiquement se fait avec le temps.  Mais sous la sacro sainte « place de parking », qui au demeurant ne manque pas à Bruxelles, les parkings publics affichant tout sauf complet, se cache la question de l’accessibilité, pertinente s’il en est.  En effet, si quelques voitures apportent bien quelques clients, la réponse pour les commerçants à leur suppression réside bien en les alternatives à offrir.  C’est ce qu’on a compris en France (notamment), où les nouveaux trams amènent beaucoup plus de chalands que les quelques voitures.  Hélas à Bruxelles rien n’a été fait en ce sens.  Point de nouveaux trams, mais en plus la plupart des lignes d’autobus existantes ont été évincées du centre ville, avec des terminus éclatés en périphérie, supprimant toute relation entre elles : qui au milieu du boulevard Adolphe Max, près de la place Rogier, qui à la gare centrale, ou encore à un nouveau terminus pompeusement appelé Grand place bien à l’écart de la Grand place.  Vu que les transports en commun apportent beaucoup plus de monde que les voitures, on a sérieusement réduit l’accessibilité du centre de Bruxelles.

Le succès du piétonnier dépendra pour une bonne part de la résolution de ce problème, avec en première instance le rétablissement des lignes d’autobus supprimées au centre, à faire suivre par une initiative plus ambitieuse de rétablissement de lignes de tram – plébiscités par les usagers et plus respectueux de l’environnement (bruit et pollution) que les voitures et les bus.  Des projets existent de (re)tracer une ligne de tram descendant de la rue Royale vers le Bourse et continuant sur la rue Antoine Dansaert (voir notamment la Cityvision).  Alors Bruxelles entrera enfin dans le XXIème siècle.

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Payer pour rouler, quoi de plus naturel ?

On en parle beaucoup, parfois en disant n’importe quoi ; on fait même des essais ; on en reste là.  De quoi s’agit-il ?  De la redevance d’usage des infrastructures routières, comme il y a par exemple une redevance d’usage de l’infrastructure ferroviaire, que les trains doivent payer pour rouler ; comme, plus proche, les péages qu’on doit acquitter pour rouler en France, en Italie, en Espagne, et dans bien d’autres pays.  En Belgique on en est loin encore, lui préférant des formules de vignettes forfaitaires, que ne sont ni plus ni moins que des taxes supplémentaires.

Dans l’esprit des citoyens, éclairés par des discours de responsables politiques qui eux-mêmes ne comprennent pas toujours la problématique, règne beaucoup de confusion.  Il est peut-être bon de démystifier.

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De quoi s’agit-il ?

La redevance d’usage des infrastructures routières, ou péage routier – bien connu en Néerlandais comme « rekening rijden », consiste tout simplement comme son nom l’indique à faire payer les véhicules lorsqu’ils circulent sur les routes.  Le prix peut être modulé selon l’endroit, le moment et le véhicule (on parle alors de redevance intelligente, qui est la bonne formule).  La localisation des véhicules se fait par GPS (plus tard Galileo, le GPS européen).

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Le prix à payer pour rouler doit être modulé selon l’endroit et le moment, avec des tarifs plus élevés notamment en ville, sur les autoroutes, aux heures de pointe.  Le tarif peut être tout simplement zéro dans la plupart des autres cas.  Ainsi, en agissant sur la congestion, on responsabilise l’usager quant à l’usage de son véhicule.

De ce fait, la redevance kilométrique encourage aussi le covoiturage, qui divise par deux le coût et le nombre de véhicules nécessaires pour transporter une personne.

  • Une redevance routière intelligente favorise la mobilité

 

En réduisant les files, on agit de même sur la pollution.  Par ailleurs le tarif doit être modulé selon le type de véhicule, et en particulier la pollution qu’il occasionne.

  • Une redevance routière intelligente est très favorable à l’environnement

 

La redevance routière est appelée à remplacer tout ou partie des taxes fixes sur les véhicules (taxe de circulation et de mise en circulation), actuellement fort élevées et qui frappent autant ceux qui roulent peu.  De la sorte, l’accès à l’automobile s’en trouve facilité, et ceux qui roulent peu ne sont plus la vache à lait pour financer ceux qui roulent beaucoup.  C’est donc le contraire du système actuel, ou d’une vignette comme le proposent certains, deux formules qui taxent aveuglément.

Certains ont plus besoin de leur voiture que d’autres, notamment en milieu rural, à l’écart des transports en commun.  Une redevance intelligente ne taxe pas l’usage des routes rurales, et ne les pénalise donc pas.

Certains ont besoin de leur voiture pour des raisons professionnelles.  Dans ce cadre la redevance est déductible comme frais professionnels, tout comme les autres frais (« frais réels »), formule nettement plus équitable que les forfaits actuels, parfaitement arbitraires.  C’est tout le contraire d’une taxe sur le travail.

  • La redevance routière est une formule socialement beaucoup plus équitable que le système fiscal actuel

 

Les véhicules sont géolocalisés, d’où la crainte d’atteinte à la vie privée.  Remarquons que, dans un autre domaine pour lequel curieusement on ne s’est jamais insurgés, chaque fois que nous utilisons notre carte bancaire nous sommes localisés ; chaque fois que nous consultons un site internet, nous sommes repérés.  La redevance routière localise un véhicule, qui peut bien être utilisé par quelqu’un d’autre que son propriétaire (ne fût-ce que du fait des voitures de société), ce qui est bien moins personnel que la carte de banque.  Et en fait, nous sommes déjà localisés puisque notre gsm sert à mesurer les files sur les routes.

  • La redevance routière en tant que telle ne porte pas atteinte à la vie privée

 

La localisation des véhicules se fait par GPS ; cela nécessite un petit appareil bon marché dans le véhicule, à l’exclusion de toute infrastructure sur le terrain, au contraire des systèmes de portiques avec caméras (et barrières dans les rues non équipées), nécessaires à ce qu’on appelle le péage cordon, ou aux dispositifs nécessaires au péage classique des autoroutes.

  • La redevance routière est une formule facile à mettre en œuvre et peu coûteuse

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La redevance kilométrique n’est rien d’autre qu’un système qui permet de faire payer ceux qui utilisent l’infrastructure routière plutôt que ceux qui ne l’utilisent pas – principe de l’utilisateur-payeur, critère de justice sociale -, et d’en moduler l’usage grâce à une tarification intelligente : solution aux problèmes de mobilité et de pollution (pollueur –payeur).

Les « forces vives » de la Société – y compris la Febiac, qui défend les automobilistes – sont pour.  Qui donc peut encore être contre ?  Seul un parti politique a osé se prononcer en sa faveur : il a pris une longueur d’avance sur l’avenir.  C’est parfois une stratégie intéressante.

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Un nouveau plan de transport à la SNCB

C’est dit : le projet de plan  de transport de la SNCB, d’application à partir de décembre prochain, est sorti, malgré la volonté de secret de son auteur.

Comme avaient déjà monté les fuites à son sujet, sa philosophie peut être résumée en deux composantes : la suppression quasi-totale des trains IC – InterCity, et la suppression de quelques trains notamment en soirée.

Tous les trains IC et IR s’appellent désormais IC, et, à trois exceptions près (sur les axes Ostende – Eupen, plus lent qu’actuellement,  et Bruxelles – Anvers), sont en fait indubitablement des IR (semi-directs), vu le nombre de leurs arrêts – tous les 8 km environ en moyenne, dans toutes les villes et de nombreux villages – et par conséquent leur vitesse commerciale – de l’ordre de 65 km/h en moyenne, mais avec des cas en dessous de 50.  D’autres «IC » sont carrément des omnibus (exemple IC 26 Charleroi – Bruxelles, avec 16 arrêts sur 60 km).  Même les relations entre les plus grandes villes n’ont plus de trains directs (sauf entre Bruxelles et Gand).

Anecdote : du fait de la dénomination « IC », la SNCB a cru devoir rassurer ceux qui avaient craint des suppressions d’arrêts ( !).

Cette réduction de vitesse ne fait que s’ajouter à celles intervenues tous les ans, qui font notamment qu’atteindre Luxembourg depuis Bruxelles prend plus de temps que depuis Paris, pourtant deux fois plus loin.  Joindre Ostende à Arlon prend maintenant (beaucoup) plus de temps que Paris à Marseille…

Quant à l’amplitude du service, l’usager retiendra qu’à 8 heures du soir il doit se méfier pour ne pas rater le dernier train (exemple Bruxelles Binche à 20h30 ou Couvin – Charleroi à 19h53).  S’il veut traverser le pays, il doit savoir que certains trajets intérieurs lui imposent de partir avant cinq heures, sous peine d’y passer la nuit.  C’est que la Belgique est un grand pays.  Ou alors parce que certaines lignes arrêtent à 18 h : record observé  Arlon – Athus, 17h14 !  Les heures des derniers départs ne respectent en fait aucune règle, et donc le service ne présente aucune fiabilité.

En banlieue bruxelloise rien vraiment de révolutionnaire : quelques lignes voient bien deux trains par heure, mais souvent non cadencés.  Toujours un train par heure dans beaucoup de gares, même dans la capitale.  De RER bien entendu pas question.  À moins de se consoler en considérant comme tels les multiples trains tournant autour de l’aéroport de Zaventem, qui, comme actuellement d’ailleurs, rouleront presque à vide.  On invoque volontiers le manque de moyens pour justifier les insuffisances, mais on n’hésite quand même pas à gaspiller quand il le faut.

Bref, nonobstant quelques améliorations qui seront certainement mises en évidence par leur promoteur, l’économie globale du nouveau plan de transport est un nouveau nivellement par le bas du service offert, sans référence aux besoins de mobilité des gens.

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Nous n’aurions pas dû savoir tout ceci : la SNCB ne souhaitait communiquer qu’en septembre, pour mettre tout le monde devant le fait accompli, et limiter la contestation.  Comme il n’y aura plus rien à faire, la réaction attendue de ceux qui ne peuvent pas faire autrement est de subir, et celle des autres, en nombre croissant, de se déplacer en voiture.

En réalité, le fait est déjà accompli, parce que la SNCB a dû demander à Infrabel les sillons, c’est-à-dire l’autorisation de faire rouler les trains.  À quelques rectifications cosmétiques encore envisageables près, la seule ouverture qui reste maintenant par rapport au projet est de supprimer certains trains.  Ne sombrons donc pas dans un optimisme béat.  Mais la question est clairement posée de savoir pourquoi une entreprise publique peut décider unilatéralement, en secret, du service public largement financé par le public.  Et pourquoi il n’y a pas de normes sérieuses pour définir cette mission.

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Réseau ferré cherche (désespérément) clients

Les élections approchent.  C’est sans doute ce qui a fait frémir notre gouvernement à l’annonce du prochain plan de transport de la SNCB, qui ne prévoit en gros qu’une nouvelle dégradation du service aux usagers.  Mais on n’a quand même pas entendu la moindre contre-proposition.

La Belgique dispose d’une infrastructure ferroviaire performante, susceptible de contribuer grandement à la mobilité, à l’allègement des files sur les routes.  Elle est pourtant très sous-utilisée : une voie ferrée belge voit passer en moyenne 40 trains par jour.  Et aux termes du prochain plan de transport, ce ne seront pratiquement plus que des trains semi-directs (même si on les appelle « IC », il ne roulent en moyenne qu’à 65 km/h, et s’arrêtent tous les 8 à 10 km).

Clairement le modèle ferroviaire belge est à bout de souffle : ceux qui sont à la barre – dirigeants SNCB et Infrabel, et responsables politiques qui les encadrent – n’arrivent plus à imaginer ce qu’il faut faire de cet outil, pourtant coûteux pour la collectivité.   Alors que le potentiel est énorme.

Notre beau réseau mérite mieux.  Nous allons ici donner aux responsables quelques pistes, pour le transport des voyageurs, qui devrait être une mission de service public.

Non pas des idées utopiques, loin des réalités, mais bien au contraire des réponses concrètes, éprouvées à l’étranger, souvent peu coûteuses au regard des budgets consacrés au groupe SNCB ; réponses à des attentes tout aussi concrètes.

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Les attentes de la Société vis-à-vis du rail sont nombreuses, et pertinentes.

Le train ne doit pas être confiné au concept « IR », trains semi-directs, seul mis en évidence dans le prochain plan de transport SNCB.

L’infrastructure ferroviaire doit au contraire accueillir au mieux tous les trafics pour lesquels elle est apte.

En les présentant « top – down », cela commence au TGV.  Tout le monde connaît.  Et ça fonctionne.

Par contre la Belgique a supprimé presque tous les autres trains à longue distance, à commencer par la triste saga de la ligne Bruxelles – Luxembourg – Suisse, et celle tout aussi lamentable de l’axe Bruxelles – Pays-Bas.  Pourtant la mobilité interurbaine (y compris internationale, surtout pour un pays de la taille d’un mouchoir de poche, au centre de l’Union européenne) ne fait qu’augmenter, pour le plus grand bonheur des entreprises d’autocar qui, elles, ne s’y trompent pas et s’en trouvent florissantes : au pied des gares de Bruxelles Nord et Bruxelles Midi il y a plus d’autocars que de trains internationaux.  Et l’organisation de dessertes ferroviaires de qualité – des trains rapides, cadencés – pourrait se faire à un coût quasi nul,  par la restructuration des nombreuses offres non coordonnées déployées sur les corridors concernés.  Que dire par contre du bénéfice.

Au niveau du pays, il devrait être superflu de rappeler la nécessité de relier fréquemment et rapidement les grandes villes, par de vrais trains InterCity – « IC » donc -, comme prévu au plan de transport de 1984 (trente ans déjà).  Rétablir ces trains, et dans l’ensemble augmenter les fréquences, ne coûterait pas cher, parce pas mal de ressources peuvent être prélevées sur les trains actuels, souvent beaucoup trop lourds (typiquement dix voitures à deux niveaux et deux locomotives pour transporter quelques dizaines de voyageurs).  À une époque où on n’aime plus attendre, des trains fréquents et rapides séduiront de nombreux nouveaux voyageurs.

Le transport suburbain et urbain est aussi un créneau de choix pour le rail, qui a l’avantage de pénétrer en site propre dans les villes engluées dans le trafic automobile.  Toutes les villes du monde comprennent ceci, et Bruxelles par exemple ne peut pas, à force d’attendre, devenir la seule ville européenne sans RER.  La SNCB a acquis récemment un nombre considérable de nouvelles automotrices, qui ne demandent qu’à rouler : il n’y a pas pénurie de matériel.  Un début de RER, le REB – Réseau Express Bruxellois, réalisable immédiatement, a été proposé.  Et le potentiel de clientèle est énorme, la part de marché du rail sur ce segment étant quasi nulle, et les autoroutes saturées.

Et les autres villes importantes (Anvers, Liège, …) ne doivent pas être en reste.  Même des villes moins grandes, qui ont l’avantage de se trouver sur les axes ferroviaires moins saturés et donc plus disponibles, peuvent avantageusement bénéficier du rail moyennant une technique moderne souple et bon marché, qui a fait ses preuves avec éclat en Allemagne, et essaime notamment en France : le train-tram.  Ici aussi, la Belgique doit-elle rester la dernière du peloton ?

Même en dehors des villes, le train-tram peut apporter un plus considérable à l’utilisation du rail en milieu rural, simplement parce que, par rapport au train classique, il permet grâce à ses performances de doubler le nombre d’arrêts – donc de clients – sans augmenter le temps d’un parcours donné, ni le coût d’exploitation.  Et, même si ce détail peut paraître anecdotique sur un réseau belge quasi totalement électrifié, on peut doter le train-tram d’un moteur diesel, à la place ou en plus des moteurs électriques ; les hybrides deviennent de plus en plus présents à l’étranger.

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On évoque parfois comme obstacle au développement des trains légers (RER, train-tram) le coût des redevances d’utilisation de l’infrastructure.  À cet égard il faut oser le dire : conformément aux recommandations internationales, tous les types de trains doivent bénéficier de tarifs fairplay, fonction des coûts engendrés, et pas de redevances punition des uns pour subventionner les autres.   Et c’est l’État qui doit y veiller.  Par ailleurs l’augmentation du nombre de trains est tout bénéfice pour le gestionnaire de l’infrastructure, qui peut donc réduire le niveau de ses tarifs.

On ne va pas évacuer la question, plus sérieuse, de la capacité des infrastructures.

Premier élément de réponse : comme on peut le constater sur base des sillons existants, il y a de nombreux vides : notamment sur les lignes nouvelles (un comble!), mais aussi presque partout dès qu’on s’éloigne de Bruxelles.

Les problèmes de capacité sont locaux, et à Bruxelles précisément il y aura un grand bol d’oxygène à l’issue des investissements en cours, portant à quatre, voire six, le  nombre de voies des grands axes convergeant vers la capitale, et à douze le nombre de voies la traversant (JNM et lignes 26 et 28).  Le passage de deux à quatre voies fait plus que doubler la capacité d’une ligne, parce qu’il autorise une ségrégation des trains selon leur vitesse, réduisant drastiquement les conflits de circulation.

Ailleurs sur le réseau, les réserves de capacité sont énormes, à l’exception de goulets locaux, que les plans d’investissements feraient bien de résoudre plutôt que de se focaliser sur quelques projets de prestige totalement décalés des besoins.  Souvent une simple voie d’évitement permet beaucoup.

Les problèmes sont aussi concentrés dans le temps : aux heures de pointe.  Mais la demande de mobilité, qu’on peut évaluer à l’aune de la circulation routière, est en fait beaucoup plus dispersée dans le temps que ne l’est l’offre de trains.  Ce n’est donc pas sur les pointes qu’il faut axer le développement de l’offre, ce qui réduit évidemment les besoins d’infrastructures.  Aux Pays-Bas il n’y a pas de trains « P » ; pourtant il y a bien des navetteurs…

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Non, vraiment, Mesdames et Messieurs les responsables : s’il vous plaît un petit effort d’imagination quant aux initiatives à prendre ; le reste suivra, parce que toutes les formules évoquées ici sont éprouvées à l’étranger, et ne requièrent pas de moyens supplémentaires, mais bien une affectation optimale de ceux qui existent.

Peut-être la SNCB ne souhaite-t-elle pas développer son service ?  D’autres en tous cas sont prêts à le faire.  Nous, citoyens-contribuables, sommes en droit d’attendre de l’opérateur ferroviaire un retour en tant que citoyens-usagers.  Et Infrabel sera tout autant bénéficiaire d’un plus grand nombre de trains sur son réseau.

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La mobilité, la grande absente des politiques

Les statistiques – par exemple, récemment, par le Bureau fédéral du Plan – rappellent que les ménages que nous sommes consacrent 12 % de leurs ressources aux transports.  Ceci sans compter ce que nous payons comme contribuables, via les dépenses publiques : à Bruxelles par exemple le budget de la STIB représente une part considérable des dépenses régionales.

Nous passons aussi pas mal de temps à nous déplacer, et le cas échéant à râler contre les conditions de nos déplacements, et donc à attendre des améliorations.

Des élections importantes approchent.  L’occasion pour les candidats de se souvenir que les politiques sont destinées notamment à rencontrer les attentes des citoyens.  Logique donc  de voir émerger la question de la mobilité dans les discours et les propositions.

Pourtant, au moins jusqu’à présent, on n’entend rien.  Apparemment paradoxal.  Qu’est-ce à dire ?   Il y a pourtant de grands enjeux sur la table.  Pour n’en citer que quelques-uns : la redevance kilométrique, l’avenir du transport ferroviaire, celui des transports publics bruxellois, le RER, …  Autant de grandes questions, qui brassent beaucoup d’argent, et qui méritent d’être traitées au mieux : c’est la raison d’être des responsables politiques.

Et pourtant…

La redevance kilométrique n’est rien d’autre qu’un système qui permet de faire payer ceux qui utilisent l’infrastructure routière plutôt que ceux qui ne l’utilisent pas, et d’en moduler l’usage grâce à une tarification  intelligente : contribution évidente à la solution aux problèmes de mobilité, et contribution à une meilleure justice sociale.  Les « forces vives » de la Société – y compris la Febiac, qui défend les automobilistes – sont pour.  Qui donc peut encore être contre ?  Seul un parti politique a osé se prononcer en faveur.

Un RER bien conçu pour Bruxelles et sa périphérie bénéficie d’un soutien sociétal encore plus grand, en fait quasi unanime.  On en parle depuis 20 ans.  La capitale européenne sera bientôt la seule ville européenne sans RER.  Et aucun parti ne fait rien, à part laisser construire de coûteuses infrastructures, parfois au grand dam des riverains, sans proposer un seul train pour rouler dessus…

Les usagers des transports urbains à Bruxelles ne sont pas mieux lotis : ils se déplacent à 9 km/h en moyenne (études RBC).  Les « grandes » réponses proposées – grandes en termes de dépenses, monopolisant presque tout le budget, au demeurant non disponible – consistent à construire un petit bout de métro supplémentaire ainsi qu’une centaine de « murs de quais » dans les stations existantes, indispensables pour automatiser inutilement ledit métro.  Alors que des solutions simples et bien moins coûteuses existent pour améliorer drastiquement le sort des usagers de la STIB, par exemple la CityVision (CityvisionFR Cityvision (NL).  Ici non plus on n’entend aucun candidat Bruxellois sur la question.

Et à l’échelle nationale la seule perspective qu’on nous offre est un nouveau plan de transport de la SNCB qui consiste à supprimer presque tous les trains Intercity (en en conservant uniquement le nom), réduisant encore un peu la vitesse des trains, en baisse continue depuis une vingtaine d’années, nonobstant des investissements considérables concédés ici aussi par les contribuables.  Même le Gouvernement s’est prononcé, pro forma, contre … mais personne n’a proposé aucune alternative.

Mesdames et Messieurs les candidats aux élections, tous partis confondus : s’il vous plaît préoccupez-vous un peu des attentes des citoyens-contribuables, qui vous mettent beaucoup d’argent sur un plateau, et en espèrent au moins un peu un retour.  Evitez de rater une guerre – et donc le cas échéant un mandat – en les niant.

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Transports en commun à Bruxelles : une nouvelle étoile est (virtuellement) née

Transports en commun à Bruxelles : une nouvelle étoile est (virtuellement) née

Il n’est pas nécessaire de s’appesantir sur la situation des usagers des transports en commun à Bruxelles, qui se déplacent à 8 ou 9 kilomètres à l’heure, moins de la moitié de la vitesse de que ceux qui utilisent une voiture.

Il y a quelques années, un groupe de citoyens avait présenté une formule intéressante, la Cityvision, qui permettrait d’améliorer drastiquement la situation pour un coût bien moindre que les quelques projets d’infrastructures lourdes peu efficaces mis en avant par le Gouvernement régional.

Il ne s’est pas passé grand chose depuis, les budgets d’investissements d’infrastructure ayant surtout fait la part belle à des portiques fermant l’accès au métro ainsi que quelques études n’apportant aucune réponse aux attentes des Bruxellois.

Il y a quelques mois pourtant un groupe politique a présenté un nouveau concept, le REB – Réseau Express Bruxellois.

Il y a déjà le RER – Réseau Express Régional – que beaucoup souhaitent, dont tous les responsables politiques parlent et pour lequel aucun ne fait rien, se retranchant aisément devant le flou en matière de responsabilités (État, régions ?  SNCB, STIB, De Lijn ou TEC ?  Ce n’est pas moi, c’est l’autre), à tel point que l’accord de gouvernement a cru devoir inventer un nouvel organe  institutionnel – la Communauté métropolitaine – pour s’en occuper… peut-être dans quelques années, l’affaire étant tout sauf prête à voir le jour.

Face à cela, le REB est un concept similaire au RER – exploiter les infrastructures ferroviaires disponibles pour assurer une desserte ferroviaire urbaine de qualité en région bruxelloise.  Il s’agit tout simplement de faire rouler des trains fréquents sur des voies existantes, ou qui existeront, entre les gares existantes complétées de quelques arrêts supplémentaires stratégiquement placés pour optimiser la desserte.  Une idée en fait identique à celle mise en œuvre dans de nombreuses villes : cela éviterait que la capitale de l’Europe devienne la dernière ville européenne sans chemin de fer urbain.

La différence avec le RER est que le REB, en offrant une desserte à haute fréquence toute la journée,   met l’accent sur l’ensemble des déplacements urbains et pas seulement sur les navettes aux heures de pointe.  Il n’est nullement concurrent du RER ; au contraire il l’anticipe, et pourra se fondre avec lui le jour – plus ou moins lointain – où ce dernier verra le jour.

Le réseau ferroviaire sur lequel se développera la REB est largement complémentaire à celui de l’embryonnaire métro bruxellois : Shaerbeek, Berchem, Uccle, Boitsfort et bien d ‘autres communes en bénéficient.

Ensemble, ils offrent aux dix-neuf communes de l’agglomération un réseau rapide, qui se superpose au réseau fin de la STIB (trams et autobus)  : 94 arrêts desservis sur 90 km de réseau parcouru à haute fréquence et haute vitesse par des trains et métros.

Le REB est ainsi complémentaire de la CityVision, qui, elle, vise à offrir une desserte fine de qualité.  Une agglomération de la taille de Bruxelles a besoin aussi d’un niveau supérieur, reliant rapidement les principaux pôles.

Du fait d’une large utilisation de l’existant d’une part, du faible nombre de kilomètres que doivent parcourir  les trains concernés d’autre part, le REB est une formule très peu coûteuse.

Axé sur la Région de Bruxelles-Capitale, il ne patauge pas dans l’imbroglio belgo-belge de la répartition institutionnelle des compétences.

On n’attend donc plus que les décisions politiques pour sa mise en place.

 

 

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Un métro fou dans le brouillard

Les transports en commun de la région bruxelloise continuent à rouler, à leur rythme, et à transporter un bon tiers des personnes en ville.  La voiture reste reine dans la capitale.   Il faut dire qu’elle est deux fois plus rapide que la stib, dont les usagers se déplacent à 9 km/h de porte à porte.

Pas vraiment génal.

Et plus personne  ne parle d’avenir…

Personne ?

Presque.

Discrètement, sans le moindre débat public sur la mobilité, pour laquelle il y aurait pourtant bien à dire, un dossier franchit les étapes vers la décision : le métro Nord.

Le projet est en effet porté sur la table du Gouvernement, étayé par une « étude de faisabilité », dont seul un résumé a fait l’objet de publicité (mais dont une présentation sur diapositives a percolé).

« Étude » mérite des guillemets, tant le document est truffé d’inexactitudes destinées à « démontrer » la pertinence de construire une ligne de métro et de supprimer des trams.  Une analyse fouillée de l’ARAU www.arau.org/fr/urban/detail/256/metro-nord-tram-55-supprime met ceci en évidence.  Il faut dire que l’auteur s’appelle « Société momentanée Bureau Métro Nord » (ça ne s’invente pas), et est très intéressé à la construction du métro.

Et pourtant, malgré les trucages, l’étude ne peut pas cacher que les  usagers des transports bruxellois verront encore leurs temps de trajet augmenter.   Ceci simplement parce que l’utilisation par le métro du tunnel Nord – Midi, irrigant le centre ville, impose d’achever le détricotage du réseau tram, multipliant encore le nombre de correspondances : cette fois-ci pour les habitants de Neder-Over-Hembeek, Forest en Uccle qui ont jusqu’ici été épargnés grâce au maintien des lignes 3 et 4.

En clair, il s’agit de dépenser un gros milliard d’euros pour détériorer l’offre de la stib.  Mille euros par personne donc, pour l’investissement seulement.

Les promoteurs de ce petit tronçon de métro soutiennent que cela ne coûtera pas si cher aux Bruxellois, parce que l’Etat payera, via l’accord de coopération Beliris.  On pourra toujours dire que faire payer sa gabegie par les autres n’est pas vraiment élégant.  Passons.  Mais surtout ce raisonnement occulte soigneusement le fait que Beliris n’est pas une enveloppe extensible.  Tout ce qui sera consacré au métro ne le sera pas à d’intéressants projets comme on en connaît actuellement, contribuant notamment à la rénovation de quartiers qui en ont bien besoin.  Et il faudra des années pour que l’enveloppe rattrape des couleurs.

Espérons que les politiques se ressaisiront avant qu’il ne soit trop tard.  Et se souviendront qu’il est bien possible d’améliorer drastiquement la mobilité de tous les Bruxellois pour beaucoup moins cher : par exemple avec la CityVision http://www.sweetmobility.net/wp-content/uploads/2010/12/CityvisionFR2.pdf.

 

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Small is beautiful

Les difficultés récemment apparues relatives à notre production d’électricité ont révélé – outre les problèmes de sécurité nucléaire, qu’on aurait mieux fait d’aborder avant la construction, mais ce n’est pas ici le propos – un problème fondamental de sécurité d’approvisionnement.  Le constat est maintenant évident aux yeux de tous qu’une trop grande concentration de l’offre met en péril la sécurité d’approvisionnement.  Il y a à cela une raison qui saute aux yeux – quoique pas à ceux des décideurs – : la défection d’une unité, quelle qu’en soit la raison, met en péril l’ensemble de l’équilibre offre / demande.

S’il  vaut la peine d’en parler ici, c’est parce que cette évidence l’est tout autant pour l’offre de transport & mobilité.

Qui écoute régulièrement  la radio ne peut manquer la litanie devenue continue sur les embarras de circulation, les maintenant bien connues « files » (« Stau », expression consacrée depuis des années en Allemagne).

Quelle en est la cause ?  Evidemment un excès de véhicules par rapport à la capacité des routes.

Quelle réponse ? Celle qui a toujours été donnée est une fuite en avant, par la création d’infrastructures à très grande capacité : les autoroutes.

Et quand on regarde un peu plus loin, on s’aperçoit que les maillons faibles sont précisément les autoroutes : c’est là que des problèmes endémiques se sont créés.

 

La concentration de l’offre a une conséquence importante sur le plan de sa sécurité et sa fiabilité : hors les problèmes structurels des heures de pointe, les files interviennent au moindre incident, qui réduit la capacité inopinément, sans que les usagers n’aient de solution de rechange.  Les autoroutes sont les centrales nucléaires du transport routier : elles assument une part considérable du transport (un tiers, sur un pour cent de la longueur totale du réseau routier), et génèrent des problèmes insolubles au moindre incident.

Quoique dans une moindre mesure, on trouve cette même démarche de concentration dans le transport ferroviaire.  D’abord au niveau de l’infrastructure : on a amputé une proportion importante du réseau, rendant pratiquement impossible le détournement d’un train en cas d’interception d’une ligne.  Mais aussi, au-delà, sur l’offre ferroviaire elle-même, où on concentre aux heures de pointe le transport d’un grand nombre de voyageurs sur un petit nombre de grands trains (« IC » et « P »), laissant sans solution les usagers en cas (fréquent) de défection, parce qu’il n’est pas possible d’organiser une alternative crédible par rapport à la problématique : transporter les gens dans des délais raisonnables.

 

Quel est l’enseignement de tout ceci ?

Qu’il vaut mieux organiser une offre – de transport, d’énergie ou autre – déconcentrée, plus apte par sa souplesse à amortir ses – inévitables – défauts de fiabilité.

 

Bien sûr la tendance à la concentration n’est pas gratuite ; elle a un but, en l’occurrence l’espoir d’économies d’échelle.

Mais si cela est vrai jusqu’à un certain point (il y a toujours un point d’équilibre), il faudrait arrêter de nier dans le calcul le coût des incidents, spécialement lorsqu’ils sont devenus le quotidien.  Celui-ci est souvent externalisé : les victimes sont largement appelées à se débrouiller elles-mêmes.  Même s’il est tentant pour le responsable de fermer les yeux, une telle attitude n’est pas légitime, spécialement s’il s’agit d’une mission de service public.

 

En sus de la sécurité, adapter l’offre à la demande plutôt que la concentrer à outrance présente l’avantage de limiter les gaspillages : transport (d’électricité ou de personnes!) sur des distances artificiellement allongées, centrales ou trains sous-utilisés, …  Ces gaspillages restent inaperçus du fait d’une imputation incorrecte des coût : « les centrales à gaz ne sont pas rentables » … parce qu’on prend comme postulat que la production nucléaire a priorité … ; « les trains P sont rentables » … parce qu’on n’en impute pas l’amortissement sur le peu d’heures où ils sont utilisés…).

Et pour ce qui est des transports publics, encore un avantage d’une offre plus adaptée : des trains plus petits, plus nombreux et plus fréquents représentent une meilleure offre, puisqu’il faut aller les chercher moins loin et moins les attendre ; ceci aussi est une dimension importante du service public.

 

 

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À quand une fiscalité sur les carburants équitable et efficace ?

 

Le principe de l’utilisateur – payeur est un principe admis en économie.

Le principe du pollueur – payeur est un principe de mieux en mieux admis, parce qu’il est indispensable à la sauvegarde de notre planète.

L’utilisation d’énergie fossile, extraite du sol, met à mal l’intégrité de la planète, et constitue une entorse à sa « durabilité ».  Le prix de revient purement économique de son extraction ne tient pas compte de ce souci ; il faut donc le corriger par le biais de la fiscalité.

La combustion de carburants fossiles émet des substances polluantes et engendrant un effet de serre.  Il faut tenir compte des dommages générés par le biais de la fiscalité.

 

La Commission européenne a fait une proposition visant à calibrer la fiscalité sur les carburants sur leur contenu énergétique.  Un tel choix est éminemment logique, fondé et cohérent avec la préoccupation de responsabiliser les acteurs et par là de limiter les atteintes à la pérennité de la terre.

Le Parlement européen a rejeté cette proposition.  Cette décision est très dommageable à nous tous.

Il n’est pas question de mettre en cause les principes démocratiques qui régissent le fonctionnement de nos institutions.  Il est cependant légitime de critiquer les décisions, au nom de l’intérêt général (l’avenir de la planète, c’est aussi celui de l’humanité).

Il est aussi important d’essayer de les comprendre, dans l’espoir de revirements salutaires.  La question est « pourquoi les députés ont-il voté en majorité contre, sachant qu’en leur âme et conscience, une large majorité partage les objectifs de développement durable ? ».

Les déclarations qu’ils ont faites pour se justifier – à vrai dire assez faibles – donnent un éclairage.  Le contexte historique aussi.

 

Parce que le contenu énergétique du diesel est supérieur à celui de l’essence, de même que ses émissions de CO2, la proposition de la Commission a pour effet d’augmenter la fiscalité sur le diesel dans les pays où elle est actuellement moins élevée.  C’est le cas de la Belgique (ce qui en l’occurrence fausse les conditions de concurrence sur le marché de l’Union).

La raison de cette situation est historique : à une époque (lointaine) le diesel était le carburant des camions, participant à l’économie, tandis que l’essence était un produit réputé « de luxe » pour les automobilistes.  Quelques voitures roulaient alors au mazout, de facto quasi exclusivement des taxis ; ces véhicules se caractérisaient par de piètres performances et des émissions polluantes non négligeables ; elles n’étaient pas considérées comme d’assez haut standing pour la grande majorité des automobilistes.  Mais cette situation fiscale avantageuse, qui n’a plus aucun fondement économique ou social, a pourtant perduré dans certains pays ; ceci a incité les constructeurs automobiles à développer des voitures diesel performantes et sexy, qui ont progressivement conquis une part de marché très importante : en Belgique plus des trois quarts par exemple.  Dans ce contexte, il est évidemment populaire de défendre la sous-fiscalisation, même s’il faut pour cela faire l’impasse sur des idéaux de développement durable (que – il faut bien le dire – pas mal de responsables politiques considèrent comme un hochet à ajouter à leur catalogue en période de croissance, et qui peut aller se rhabiller lorsque l’économie ou l’emploi éternuent).

Mais l’enjeu n’en reste pas moins là : le trafic n’a pas cessé d’augmenter, et, nonobstant les progrès techniques substantiels en matière de rendement des moteurs, et l’argument volontiers avancé que le rendement du moteur diesel est supérieur à celui de son confrère à essence, la réalité est là : la consommation de carburant dans les transports routiers n’a pas cessé d’augmenter, dans des proportions importantes, et avec elle les émissions de gaz à effet de serre ; ceci alors que tous les autres secteurs grands consommateurs d’énergie sont stables.  Le prix du carburant, restés modeste nonobstant les soubresauts du brut, est un important facteur d’explication ; le coût au niveau du budget des ménages a précisément pu être contenu grâce au shift de l’essence vers le diesel, moins taxé ; ainsi en 2010 le poste « carburant » du Belge est légèrement sous les 3 % de son budget, exactement au niveau de 1999.

Deuxième point important: le diesel pollue plus, avec un effet négatif non négligeable sur l’environnement et sur la santé (asthme), touchant spécialement des personnes fragiles ; il est un des grands responsables du fait que de nombreuses régions européennes n’arrivent pas à respecter la directive (européenne !) sur la qualité de l’air.

Accessoirement, on peut aussi noter que l’Europe produit trop d’essence pour sa propre consommation, ce qui induit un déséquilibre sur les marchés.

Si la fiscalité sur le carburant (re)trouvait une neutralité – cessant de favoriser l’un en défaveur de l’autre -, l’industrie automobile serait également incitée à réorienter ses efforts de R&D, et donc ici à reprendre l’amélioration des moteurs à essence, déjà nettement moins polluants que les diesel.

 

Une politique de fiscalité avantageuse pour le diesel, qui au demeurant ne répond à aucune considération d’intérêt général, n’est plus tenable.  Les opposants à la proposition de la Commission ont pris une grande responsabilité vis-à-vis de notre avenir.  Et leur position est d’autant plus indéfendable que la proposition prévoit une période d’adaptation qui permet l’adaptation du parc automobile à la faveur de son renouvellement naturel, sans la moindre douleur pour le portefeuille des citoyens-électeurs : en fait ceux qui ont voté contre ont mal lu le texte, ce qui en soi est une responsabilité aussi.

 

 

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Bruxelles aura-t-elle un jour un RER ?

Bruxelles aura t’elle un jour un RER ?

Tout le monde en parle depuis près de vingt ans.

Personne ne fait rien, sauf des grands travaux d’infrastructure, qui sont souvent justifiés par le RER, mais dont il est tout sauf sûr qu’ils lui seront destinés.

En fait une divergence de fond entre les différents acteurs concernés existe quant à son objet :

  • Pour les régions flamande et wallonne et pour la Sncb le RER doit amener le plus rapidement possible les navetteurs vers le centre de Bruxelles, sans s’arrêter dans les communes périphériques
  • Pour la Région  bruxelloise, qui manque cruellement de transports urbains performants, il doit aussi desservir l’agglomération, sous peine de servir uniquement l’exode urbain

À ceci s’ajoute à la faveur des perspectives d’accroissement de la population bruxelloise un nouveau discours sur la saturation de la jonction Nord – Midi, qui appellerait de nouveaux investissements pharaoniques, prétexte idéal pour remettre à long terme la création d’un RER.

 

Pourtant les problèmes invoqués, exposés par des postulats qui nous sont imposés par des « techniciens » de la sncb, et sont avalisés par les politiques, sont pour l’essentiel faux :

Pour la Jonction Nord – Midi

  • La JNM présente environ 30 % de réserve de capacité
  • Les retards de trains, invoqués pour « démontrer » la saturation, constituent un argument purement fictif, puisque avant il y avait plus de trains et moins de retards[1]
  • La demande qui concerne la JNM ira en diminuant, de par la dispersion des destinations au sein de la RBC (déconcentration de l’emploi) ; il est donc prioritaire de renforcer la desserte ailleurs, notamment vers le quartier européen[2]
  • Le nombre de trains que représente un RER raisonnable (en JNM 12 par heure, dont il faut défalquer les trains L remplacés), ne pose aucun problème d’insertion, puisque le total serait encore inférieur au maximum que la Jonction a connu dans le passé

La Jonction Nord – Midi peut parfaitement accueillir un RER de haut niveau sans préjudice pour la circulation des autres trains

Pour les arrêts

  • Les arrêts supplémentaires demandés par la RBC – typiquement un ou deux sur un trajet de pénétration vers le centre de Bruxelles  – ne péjoreraient que de manière marginale le temps de parcours des trains, réputé être l’inconvénient pour les navetteurs ; la simple utilisation de matériel[3] et d’un mode d’exploitation adaptés à un RER suffirait à compenser cette perte
  • Le postulat lui-même de perte de temps n’est pas pertinent, parce que ces arrêts rapprocheraient les navetteurs de pas mal de leurs destinations[4], réduisant d’autant leur temps de parcours : or c’est le temps de parcours des usagers qui est l’indicateur pertinent pour un service de transport.

Les arrêts demandés par la RBC sont bénéfiques autant aux Flamands et aux Wallons qu’aux Bruxellois, et ne posent aucun problème technique ou d’exploitation.

*

Les solutions pour le RER – comme d’ailleurs en tout autre domaine – doivent se fonder sur une maximisation de l’utilité et une minimisation du coût (sens large), en exploitant au mieux les opportunités, et bien sûr en tenant compte des vraies contraintes techniques et financières.

Quelques principes concrets découlent de cette approche :

  • Faire du RER un outil utile à la fois aux navetteurs de la banlieue et au Bruxellois (beaucoup plus nombreux que les premiers)
  • Pour cela utiliser les mêmes lignes, complétées de quelques arrêts qui optimiseraient la desserte, parcourues avec des fréquences acceptables pour le service requis, y compris en ville (intervalles maximum de 15 minutes en journée)
  • Concevoir le RER en complément du système de transport urbain fin[5], une agglomération de la taille de Bruxelles ayant besoin de deux « couches » : une desserte fine et une liaison rapide entre quartiers et centre ville ; le RER met les gares urbaines à une dizaine de minutes des principaux pôles de destination, ce qui présente une utilité indéniable pour les quartiers bruxellois desservis par le train[6].

*

La RBC dispose d’un grand potentiel de capacité ferroviaire : en gros quatre axes, totalisant quatorze voies dès finalisation de la jonction WSJ.  Avec un tel potentiel, actuellement très sous utilisé, il est possible de répondre à un énorme accroissement de la demande de déplacements, en créant le maillon manquant : un réseau interquartiers rapide, complétant un réseau urbain fin.  Il n’est donc pas nécessaire de réaliser des investissements complémentaires significatifs, avec ce qu’ils impliquent en termes d’impacts financier, environnemental/urbanistique, et de délais.[7]

Les différents projets RER qui circulent prévoient partout une desserte au quart d’heure en pointe ; il suffit pour faire un RER très performant à l’échelle urbaine (aussi) d’étendre cette fréquence[8] en journée, ce qui par définition ne pose aucun problème de capacité, et d’ajouter les arrêts RBC – qui ne coûteraient rien en termes de temps de parcours des trains, et au contraire feraient gagner du temps aux navetteurs[9]. Parmi les projets sur la table, certains sont sérieux, et pourraient sans problème être optimisés (en particulier – mais pas seulement – pour prendre en compte la zone de l’aéroport).

Il est possible sans investissements importants hors ceux déjà engagés (124, 161, 50, WSJ), et sans délais de mettre en œuvre un RER sur toute l’infrastructure disponible et de le compléter au fur et à mesure de la mise à fruit des chantiers en cours.

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Le problème n’est pas technique, mais politique, avec au départ un problème de mentalité de la part des responsables attitrés – le management du groupe sncb -, légitimé par une propension des responsables publics à avaliser leurs déclarations sans trop d’esprit critique, et de voir trop facilement en les travaux d’infrastructure la réponse[10] à tous les problèmes.

Il n’est un secret pour personne que la sncb n’aime pas le RER, essentiellement parce qu’il s’agit d’un concept nouveau (pour elle), répondant à une problématique que l’entreprise n’appréhende pas : la desserte urbaine et périurbaine.  En fait, à défaut de renouveler ses cadres[11], il suffirait de confier le RER à une entreprise dédiée, compétente[12].

Mais pour ce faire, il y a lieu de répondre préalablement à une question préjudicielle, qui reste en suspens : définir les responsabilités.  En effet, à l’heure actuelle, personne – ni l’Etat ni aucune des trois régions – n’exerce cette compétence, pour des raisons propres à la politique belge.  Ce problème a été timidement évoqué dans le cadre de la réforme de l’Etat en cours, mais il doit encore être réglé.

À l’instar de ce qui existe dans la plupart des grandes agglomérations à l’étranger, qui souvent ont un RER, Il faut une Autorité responsable du transport à l’échelle du bassin de vie et d’emploi bruxellois, c’est-à-dire de la zone RER.

Pour ce il faut faire abstraction de tabous politiques.  Pour décrisper les esprits, on notera que ces deux conditions – entreprise dédiée chapeautée par une autorité responsable – ne sont  nullement synonymes de privatisation, parce que l’entreprise peut parfaitement être publique[13], , pas plus que d’un abandon de la notion de service public, bien au contraire parce que le rôle même de l’Autorité serait de le définir, ce qui n’existe pas à l’heure actuelle pour le RER.

Il faut aussi assurer le financement de l’exploitation, qui n’en sera que plus rentable si le RER remplit sa double mission de transport urbain et suburbain.

Alors qu’il est possible sans investissements importants et sans délais de mettre en œuvre un RER, ce n’est possible qu’au prix des décisions politiques qui s’imposent.  Le parti qui aborderait les questions qui conditionnent la naissance d’un RER à Bruxelles se mettraient une plume au chapeau, politiquement rentable, parce que répondant à de fortes attentes des citoyens.

 


[1] La ponctualité actuelle  montre donc avant tout la diminution de compétence de l’exploitant ferroviaire

[2] Ce qui au demeurant réduirait le besoin de capacité du métro, utilisé par de nombreux navetteurs largués gare centrale qui prennent le métro vers la rue de la loi ; un autre « problème » majeur des transports en commun bruxellois serait donc éliminé

[3] Le matériel prévu par la sncb est inadéquat

[4] L’exemple le plus frappant est Erasme, qui réduirait de (2 fois par jour) une demi-heure (!) le trajet des nombreux navetteurs de Flandre qui se rendent dans le zoning d’emploi attenant, mais de nombreux autres cas se présentent également

[5] qui devrait, lui aussi, répondre de manière performante aux besoins, à l’image de la Cityvision

[6] Pour autant qu’ils soient réellement desservis : cfr exigence de fréquence

[7] Quelques goulets doivent être résolus et peuvent l’être à peu de frais  Parmi eux

  • le raccordement  L161 – JNM pertuis est (voies 5/6),
  • les relations Schaerbeek – Laeken du quadrilatère, zone ferroviaire traitable sans casse urbanistique
  • le pont sur le canal, déjà prévu pour quatre voies

[8] voire plus où c’est possible et pertinent

[9] cfr supra

[10] Que n’utilise t-on pas le terme RER lorsqu’on parle des travaux à Boitsfort ou à Uccle !

[11] Ce qui, au vu de l’expérience, se montre particulièrement difficile : cfr l’absence de progrès depuis 2003

[12] Et aussi d’exercer un réel contrôle public sur l’attribution des sillons pour les différents trains

[13] comme la stib, la VVM ou les SRWT/TECs

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